Dans ma mission un peu austère,
puisqu’il s’agit de rassembler et de contrôler toutes les
données de base pour la rédaction du plan à cinq
ans du plus grand complexe sidérurgique de Roumanie,
principalement axé sur la production de tôle – ce que
fait Sollac, filiale d’Usinor, à Fos et à Dunkerque –,
j’ai affaire à de jeunes économistes, financiers ou
comptables de bon niveau qui, dans la bonne humeur, apportent tout
leur cœur à nous aider. L’acquisition d’un ordinateur portable
a transformé mon mode de travail. Bien souvent, je laissais
mon clavier à de jeunes Roumains qui rentraient directement
leurs données suivant une grille que nous avions
préparée à l’avance. La situation économique stagne
désespérément, et pourtant on voit quelques
signes de progrès, qui ne se traduisent pas dans le pouvoir
d’achat des Roumains. Beaucoup de mes interlocuteurs ne gagnent pas
beaucoup plus de 500 F par mois. Même avec un coût de la
vie que l’on peut estimer quatre fois moins élevé que
le nôtre, il ne reste pas grand-chose quand on a payé
son loyer et son chauffage, sans parler des retraités, dont le
pouvoir d’achat est laminé par l’inflation. Partout on sent, une fois une
réserve systématique vis-à-vis de
l’étranger dépassée, un grand désir
d’échanges. Malgré les difficultés, les Roumains
supportent très mal l’image donnée par les
médias occidentaux d’un pays catastrophe. Ils sont très
fiers de leur histoire, de leur culture et de leurs paysages, sans
parler de la foi pour ceux, croyants, qui sont nombreux à
remplir les églises et qui s’attristent de notre
tiédeur religieuse. Les relations entre pays sont
dominées aujourd’hui par des considérations
économiques. C’est sans doute nécessaire, mais la
France laisse peu à peu se perdre un capital de confiance
qu’elle avait dans les pays de l’Est et qui aurait pu être
ravivé avec la chute du communisme. (François-Xavier
serait mieux placé que moi pour en parler. Pourquoi pas un
prochain message électronique à ce sujet, Xavier
?) En face d’une mondialisation qui
privilégie la culture Coca-Cola, McDonald’s, il y a encore une
place pour une approche complémentaire, une certaine
spiritualité, dont sont porteuses les traditions de l’Est. La
France aurait pu tenir sa place dans cette promotion. En vue d’un prochain exposé au
Rotary, je suis allé avec mon appareil photo chercher des
traces de la France dans Bucarest. J’ai trouvé : Affection à tous. Bruno
Lepercq. in
La gazette de
l'île Barbe
n° 42