Maître Pariset et les poires

ou la grande passion d'un notaire de campagne

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Joseph Pariset ("famille Pariset", supplément au n° 55, 4,313) était un cousin issu de germains d'Aimé Pariset, lui-même arrière grand-père d'Ernest Pariset, d'Élisabeth Jaillard, d'Aimée Deloule et de Paul Pariset.

 

Joseph Pariset fut notaire à Curciat-Dongalon pendant de longues années, vers le milieu du XIXe siècle. C'est un personnage qui n'a pas laissé, sur le plan professionnel, des souvenirs vivaces dans la mémoire des gens de Curciat. En revanche, il était très proche de la nature, un peu écologiste avant l'heure, et s'intéressait beaucoup aux plantes. Il avait installé un élevage de vers à soie dans son grenier et, surtout, il avait planté un verger très important à base de poiriers, comme c'était la mode à l'époque. Il semait et sélectionnait de nouvelles variétés fruitières et avait acquis dans ce domaine une notoriété qui dépassa le cadre de la Bresse.

[Obtention de nouvelles variétés de poires]

Au concours agricole de Bourg en 1859, il exposa 90 variétés de poires et reçut une médaille d'argent pour sa collection. Voici ce qu'en dit le chroniqueur du Journal du Sud-Est : "le concours d'amateurs, le premier prix a été accordé à M. Pariset, de Curciat-Dongalon, pour sa belle collection de poires composée de 90 variétés, dont quatre issues de semis. Une de ces quatre variétés a déjà été dégustée par le Congrès pomologique et jugée digne de figurer sur les catalogues. Il serait à désirer que l'heureux obtenteur de ces nouveautés pût indiquer de quelles sources elles sont issues…"

Sur ces quatre variétés, deux nous sont connues. Celle qui fut dégustée par le Congrès pomologique s'appelle Saint-Germain-Puvis, sans doute issue d'un semis de poire Saint-Germain, qui est une ancienne variété très peu cultivée actuellement car l'arbre est faible et peu résistant. La création de M. Pariset est certainement une amélioration de cette variété. Elle fut inscrite de nombreuses années sur le catalogue de la Société pomologique, puis fut rayée. J'ignore pour quelles raisons. André Leroy, l'un des plus importants pépiniéristes du XIXe siècle, a écrit un ouvrage en quatre volumes, Le Dictionnaire pomologique, de renommée mondiale, dans lequel il décrit 900 variétés de poires. Nous y trouvons en bonne place la variété de Saint-Germain-Puvis. Voici ce qu'en dit André Leroy : "provient du département de l'Ain, où M. Pariset, de Curciat-Dongalon, l'obtenait en 1842. M. Puvis, auquel on l'a dédié, fut longtemps président de la Société d'émulation de l'Ain." L'autre variété créée par Joseph Pariset nous est connue uniquement de l'ouvrage d'Alphonse Mas, le pomologiste bressan, qui écrivit son livre Le Verger vers 1870. Cette variété, appelée beurré-Varennes de Fenille, est classée dans les poires d'hiver et jugée très intéressante par Alphonse Mas. Il semble qu'Alphonse Mas ait eu des rapports assez nombreux avec Joseph Pariset. Peut-être est-il même venu à Curciat…

[La formation d'un instituteur]

La Société d'horticulture de l'Ain encourageait, à cette époque, les instituteurs qui enseignaient l'horticulture à leurs élèves. Nous trouvons, dans un des bulletins de cette société, un article très intéressant concernant l'instituteur de Curciat :

". Chaffrengeon, à Curciat-Dongalon ; prime de 45 F. M. Chaffrengeon est à Curciat depuis 1854 ; il a commencé en 1855 son enseignement agricole. Près de la maison d'école, il y avait un terrain nu et inculte depuis deux ans. Aujourd'hui, on y trouve un jardin de 4 ares, une terre-verger de 16 ares, une pépinière d'un are, en tout 21 ares cultivés. Le jardin contient 39 arbres de diverses formes, des groseillers et des rosiers ; le verger a 182 arbres également de formes diverses ; la pépinière a 125 arbres, parmi lesquels des néfliers, des sorbiers et des figuiers. La cour contient en outre 14 arbres divers. La totalité des arbres plantés par M. Chaffrengeon est donc de 360.

". Chaffrengeon a été dirigé dans la culture de ses arbres par M. Pariset, notaire à Curciat. Il ne pouvait être à meilleure école. Voici les détails que donne M. Pariset sur les arbres de M. Chaffrengeon : "La commune ne lui a fourni ni arbres ni fumier ; il a acheté quelques arbres et il a élevé le plus grand nombre. Ils paraissaient avoir six ou sept ans de plantation et sont bien conduits, les branches sont bien étagées, le pincement a été fait régulièrement et avec succès." M. Pariset ajoute que M. Chaffrengeon transmet très consciencieusement ces leçons aux enfants de son école."

Pierre BASSET.

In Petites Histoires de pommes et autres fruits.

 

in La gazette de l'île Barbe n° 61, été 2005

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