Septembre 1982 : première
année de solfège. L'année suivante, c'est parti
pour la batterie : très impressionnant ! Pendant le premier
trimestre, j'ai appris sur un vieux tambour, puis un soir, en
rentrant de l'école, surprise : ma batterie m'attendait dans
ma chambre. Ce sont les voisins qui ont été contents
! À l'entrée en
sixième, avec quelques copains, on décide de monter un
groupe : les Mini-Corsaires. Tous les samedis après-midi, on
répétait les morceaux du top 50 :
deux guitares, un clavier, une batterie ; on faisait ce qu'on
pouvait, mais surtout, on rigolait bien. En 1986, j'intègre les rangs de
l'harmonie des Verriers de Veauche au pupitre des percussions.
L'harmonie ayant besoin de tambours, je suis également des
cours de tambour. C'est à peu près à
cette époque que le désir de travailler dans la musique
se manifeste. Je décide donc de faire mes études
secondaires en 1989 au lycée Honoré-d'Urfé dans
la section musique. Parallèlement, sur les conseils
du directeur de Veauche, je m'inscris au conservatoire de
Saint-Étienne. Après un concours d'entrée, je
suis admis dans la classe de percussion de M. Boisson. Et là,
surprise ! Il n'y a pas de cours de batterie mais des cours de caisse
claire, de timbales et de xylophone. Bien entendu, les cours de
solfège sont obligatoires (jusqu'à trois heures par
semaine), ainsi que la participation à des ensembles
orchestraux. Parallèlement, j'ai suivi
à Veauche les cours de tambour : j'obtiens un premier prix
régional en 1991. Je décroche mon
baccalauréat A3 musique, mention " assez bien ", en 1992, puis
direction la faculté de musicologie à
Saint-Étienne, où, trois ans plus tard, j'obtiens mon
diplôme d'études universitaires générales
(DEUG). En 1999, je termine mon cursus au
conservatoire : médaille d'or de percussion. Deux ans avant,
j'obtenais la médaille d'or en musique de chambre et le
certificat de fin d'études en solfège. Le service militaire n'a pas
échappé à la règle : je l'ai fait dans la
musique ! J'ai été incorporé en octobre 1995 au
22e régiment d'infanterie à Lyon. Cela a
été dix mois de musique quotidienne :
défilés, prises d'armes, concerts pour les civils. On
répétait tous les matins, soit la fanfare, soit
l'harmonie, soit le big
band de jazz. En 1993, c'est à la chorale de
Veauche que je rencontre Christelle. Nous nous fiançons
à Noël 1994. Le 5 juillet 1997, c'est le mariage, avec la
participation de l'harmonie, de la chorale : une journée
très forte et inoubliable. Le 19 novembre 1999, naissance de
Camille, le 4 novembre 2001, naissance d'Audric, et le 7 avril 2005,
un troisième bout de chou, Anaëlle, vient
compléter la tribu. En 1990, je termine mon cursus musical
à Veauche. Étant l'élève le plus grand,
je me vois proposer par le directeur, qui ne trouve pas de professeur
pour assurer les cours l'année suivante, de prendre le poste.
Me voici donc, à 16 ans, professeur de batterie, pour deux
à trois heures par semaine seulement. En 1993, mon ancien professeur laisse
ses cours de tambour et de percussion à l'école de
musique de Feurs. Je prends donc sa place. Les années suivantes,
grâce notamment au bouche à oreille, à mon
professeur de percussion du conversatoire, je vais donner des cours
dans plusieurs écoles du département :
Bussières, Montbrison, Saint-Jean-Bonnefonds, La Fouillouse,
Saint-Genest-Lerpt, Aveizieux, Veauchette, Le
Chambon-Feugerolles. Durant ces années, le statut de
professeur en école de musique n'est pratiquement pas
défini. Chaque responsable, souvent bénévole,
est libre dans le choix de son équipe pédagogique et
dans l'organisation de son école. Selon les communes, on est
employé soit à la vacation, soit en contrat à
durée déterminée. Depuis 1998, les structures se sont
organisées. Une convention collective a été
élaborée, garantissant la reconnaissance des
diplômes, de l'ancienneté, etc. Actuellement, j'enseigne dans les
écoles de Veauche, de Saint-Héand, de Saint-Galmier, de
Saint-Just-Saint-Rambert et de Roche-la-Molière. J'ai intégré l'harmonie
en 1986, en percussion. En 1990, la chorale de Veauche monte la
comédie musicale sur la Révolution française, et
fait donc appel aux tambours de l'harmonie. J'ai
apprécié l'ambiance. L'année suivante, j'en
faisais partie. Depuis 2000, je ne suis plus chanteur, mais je
m'occupe de la sonorisation pour le spectacle annuel. En septembre 2003, le sous-chef de
l'harmonie décide de prendre une année de repos. Le
président et le chef me demandent, au vu de mes
qualifications, de le remplacer. À l'harmonie, je suis le
sous-directeur (ou sous-chef). Je ne dirige donc pas tous les
morceaux. Dans un orchestre, le rôle du
chef est de coordonner les différents instruments entre eux,
de les faire jouer ensemble, en essayant de retranscrire le plus
fidèlement possible ce que le compositeur a
écrit. Il existe cependant une
différence importante entre un orchestre professionnel et un
orchestre amateur comme l'harmonie : le niveau musical des musiciens.
Dans le premier cas, les musiciens jouent les morceaux sans erreur
dès la première fois. Le chef peut donc
immédiatement travailler l'interprétation. Dans le
second cas, les musiciens ont besoin de plusieurs lectures du morceau
pour le jouer correctement. Le chef doit donc leur expliquer comment
jouer certains passages, corriger les fausses notes, expliquer
certains enchaînements rythmiques. À Veauche, le premier objectif
du chef est donc d'interpréter correctement le morceau. Pour
cela, le chef a comme partition un " livret-conducteur ". Ce
conducteur regroupe toutes les partitions de l'orchestre. Le chef
peut contrôler et vérifier n'importe quel
instrument. Pour préparer un morceau, je lis
le conducteur à la maison. Je repère qui fait quoi :
quel instrument joue la mélodie, quel instrument fait un
contre-chant ; j'essaie aussi d'anticiper sur les passages qui
poseront le plus de difficultés. Sur le conducteur, je note
les différents départs des instruments, les changements
de tempo, les nuances, tous les points importants qui structurent le
morceau. Lorsque je dirige, il m'est impossible de lire toutes les
partitions du conducteur en même temps, je lis donc les parties
les plus importantes. Grâce aux points de repère que
j'ai notés, je sais de quel instrument je dois m'occuper. Pour
les autres instruments, c'est à l'oreille que je
décèle les erreurs. Ensuite, on travaille pendant les
répétitions (une heure trente par semaine). Dès
la première lecture, on se rend compte du travail à
fournir. Il faut donc faire travailler les différents pupitres
les uns après les autres. Prenons par exemple un passage de
trompette important : on commence par le jouer lentement en
corrigeant les fausses notes et les erreurs rythmiques. Ensuite, on
travaille les articulations du passage, c'est-à-dire
l'interprétation mélodique, telle note est
accentuée, telle autre est plus courte, on insiste sur le
respect des nuances, etc. Je fais travailler la mélodie seule,
puis juste l'accompagnement, et finalement je mélange les
deux. Petit à petit, les
progrès sont là, je peux donc, au fil des
répétitions, m'attacher à
l'interprétation propre du morceau. Cette
interprétation est guidée par les indications du
compositeur, mais aussi par ce que je ressens et ce que je veux
entendre. Pour le faire comprendre aux musiciens, je leur chante ce
que je veux, je peux utiliser des comparaisons, par exemple : " jouez
plus léger, soyez plus percutants, " etc. Pour réussir
à obtenir ce que l'on veut, il faut savoir déjà
soi-même ce que l'on veut, car les musiciens qui sont en face
font totalement confiance au chef, et lorsque les morceaux sont
joués en concert, il faut motiver " les troupes ", leur
demander une grande concentration, et surtout qu'ils prennent du
plaisir à jouer ces morceaux. Puis on se retrouve sur scène
avec le trac ! Eh oui, j'ai toujours le trac avant une prestation. Le
morceau va commencer, tous les regards des musiciens sont
tournés sur moi, et là, je ressens une grande
émotion, et je me dis : il faut que cela soit parfait, on n'a
pas le droit à l'erreur. Trois, quatre, c'est parti, il faut
assurer les départs des instruments, avoir des gestes
précis et clairs pour être bien compris, il faut se
montrer sûr de soi et rassurer éventuellement, par un
sourire, certains instrumentistes plus faibles qui doivent jouer un
passage un peu difficile, montrer sa satisfaction quand tout se passe
bien, mais également " faire les gros yeux " si on estime que
ce n'est pas très beau. Lorsque le morceau se termine, et que
les applaudissements résonnent, je ressens un grand
soulagement et une grande joie, partagés par les musiciens,
car sans eux, le chef n'est pas d'une grande utilité.
Depuis tout petit, j'aime la musique,
et aujourd'hui, j'ai la chance que cette passion soit devenue mon
métier. Enseigner la musique en école de musique est,
pour moi, plus intéressant qu'en collège, car
l'élève qui est en face de moi est volontaire pour
apprendre. Je suis toujours heureux de voir réussir les
élèves lors d'examens ou de concerts, ou de les revoir
quelques années après, jouant dans un groupe.
Grâce à mon métier,
à la direction d'orchestre, à toutes mes
expériences diverses, j'ai eu l'occasion d'aborder, de jouer
toutes sortes de musique : classique, jazz, musette,
variétés, rock, contemporaine, ce qui est très
enrichissant. Voilà, en quelques mots, je vous
ai raconté mon parcours. Pour conclure, je veux remercier de
tout cœur mes parents, qui m'ont toujours fait confiance, m'ont
soutenu, parfois remis sur le bon chemin, et merci aussi à
Christelle pour sa patience. Merci à vous trois. Sylvain [JAILLARD].
Dis-moi, n° 16, été 2005, p.
3-4. in
La gazette de
l'île Barbe
n° 64, printemps 2006