Pour « les »
préparer à la délinquance...
*
Parents,
- Donnez-lui tout et tout de suite.
Surtout ne lui dites jamais "non". Ça le traumatiserait
!
- Ne le punissez pas. Ou si vous
cédez un jour à la tentation d'une punition,
retirez-la tout de suite, avec un gros bisou sur le front.
- Trichez devant lui avec la
société. Dites-lui bien qu'il a des droits et aucun
devoir envers elle.
- N'épargnez surtout pas la
société où il vît. Il adore trouver
tout stupide, idiot, inutile et destructeur. Ne relevez jamais ce
que la société a de bon.
- N'ayez pas peur de vous disputer
entre vous, parents, en sa présence. Le jour où vous
vous séparerez, ça ne l'étonnera pas. Il y
sera longuement préparé.
- Dites-lui bien, si vous vous
trompez, que c'est la faute aux "autres", jamais à vous. Il
apprendra vite que la société et les autres
porteront la responsabilité entière de tout ce qu'il
fera de mal.
- Laissez-le appuyer jour et nuit sur
le bouton de la télé, aller voir le film qu'il veut,
et sortir quand il le désire en rentrant à l'heure
de son choix.
- Ayez beaucoup d'indulgence
dès son plus jeune âge pour les expressions
cavalières dont il vous gratifiera. Laissez-le libre de
dire ce qu'il pense, sans frein.
- S'il insulte un professeur qui l'a
foutu à la porte de la classe, allez voir tout de suite cet
éducateur répressif et dites-lui, devant votre
gosse, tout le mal que vous pensez des enseignants qui ne se
laissent pas faire.
- Donnez-lui du fric sans lui
apprendre à le gagner. Les copains ont tout ce qu'ils
veulent, dit-il ? Faites pareil. Donnez sans compter.
- Elevez-le dans le culte de rargent,
des biens matériels et du chacun pour soi.
- Aiguillez-le dans toutes les
disciplines sportives ou intellectuelles dès que vous
sentez qu'il a des dons pour les pratiquer. Mais ne lui donnez
aucune formation morale ou spirituelle. Ça sera à
lui de choisir quand il sera majeur.
- Si, à la maison, il a tout
ce dont il a besoin, ne perdez pas de temps à lui dire que
vous l'aimez ou à l'écouter. Vidéo, minitel,
sono occuperont son coeur et son esprit.
- Ne lui demandez jamais de service
à la maison et quand il a les pieds sous la table,
écoutez bien ses critiques sur le menu.
- N'ayez pas peur de jeter au
vide-ordures son assiette pleine quand brusquement il
décide de ne plus manger ce qu'il s'est servi.
- Apprenez-lui à se
méfier des autres, en commençant par les voisins
immédiats que vous critiquerez
régulièrement.
- Dites-lui bien qu'il ne trouvera
pas de travail parce que les étrangers et les
immigrés nous bouffent notre pain, qu'ils sont la cause de
notre chômage. Affirmez votre certitude de la
décrépitude de la France à cause de ces
nuisibles qui nous envahissent.
- Ne cherchez pas le dialogue quand
ils sont adolescents. Ils adorent s'enfermer en
eux-mêmes.
- Par contre, s'ils sont bruyants,
laissez-les s'exprimer.
- S'ils se vautrent à dix-huit
ans sur les fauteuils et le divan, en refusant tout (école
et travail), n'intervenez pas. Ils ont besoin encore de la chaleur
du foyer.
- Si vous constatez que votre
portefeuille a été "allégé" de
quelques billets, ou si l'alcool disparaît
mystérieusement chez vous et si les cendriers sont toujours
pleins, ne dites rien. C'est un mauvais passage.
- Enfin, si un jour la police vous
téléphone pour que vous veniez au commissariat parce
que votre enfant a de la drogue sur lui ou vient de faire un
cambriolage, dites : "C'est son problème" et essayez de
vous souvenir de tout le mal que vous pensez de oe fils ou de
cette fille dont vous n'avez jamais rien pu tirer.
Ou bien préparez-vous à
aller de parloir de prison en centres de cure en vous disant que vous
l'avez conduit là irrésistiblement et qu'il est temps,
s'il n'est pas trop tard, de sauver ce qui peut l'être
encore.
Guy
GILBERT
In La gazette de l'île Barbe n° 11
Hiver
1992
Sommaire
php3;
include("inc_log.php");
?>