Lisette [Elisabeth]
POIDEBARD Abbaye d'En-Calcat
(Dourgne), Annonciation, lundi 8 avril
1991. Les aléas du calendrier
liturgique ont reporté au 8 avril la célébration
de la fête de l'Annonciation. Présider ici pour la
première fois l'eucharistie, avec cette présence toute
spéciale de Marie, c'est une grâce heureuse... qui m a
interrogé : la présence discrète de Marie dans
nos vies, la connaissons-nous vraiment ? Si nous savions - si chacun
de nous avait vraiment conscience de toutes les grâces qu'il a
reçues au cours de sa vie par l'intermédiaire de Marie,
par son intercession, sa prière - si nous savions vraiment,
peut-être serions-nous écrasés de honte... et de
reconnaissance. "Je confesse à Dieu..."
De tous les passages de l'Ecriture, le
récit de l'Annonciation est, sans doute, celui qui exprime au
plus haut point la gratuité de l'initiative divine. Comment
cette petite fille de Galilée peut-elle être choisie
pour le destin le plus extraordinaire de l'histoire ? Car c'est bien
toute la Rédemption de l'humanité qui va se jouer dans
le choix d'une personne, Marie, qui n'y est pour rien. Une gratuité aussi totale,
tellement absolue, n'est pas sans nous rappeler celle qui nous a fait
advenir à l'existence, chacun de nous, sans que nous n'y
soyons pour rien. Et nous pressentons bien qu'une telle initiative ne
peut que nous précéder de façon radicale, et que
Dieu seul peut en être la source. Aussi provoque-t-elle
surprise, crainte et questions. "Comment cela se fera-t-il ?"
Chacun de nous n'a-t-il pas eu une fois
ou l'autre ce sentiment d'être regardé personnellement
par Dieu ? Le choix de Dieu, le regard de Dieu qui
se pose sur moi, c'est, en même temps qu'une joie profonde, une
crainte et une hésitation bien normale. Car, à toutes
les questions qui ne manquent pas de se lever, une seule
réponse est apportée: "Ne crains pas, car rien n'est
impossible à Dieu." Réponse qui est très
belle... et très exigeante, car elle signifie : "Ne pose pas
de questions. L'Esprit-Saint viendra sur toi. Désormais, c'est
Dieu qui mènera ta vie... jusqu'au jour où tu
étendras les mains, qu'un autre te ceindra et te mènera
là où tu ne voudrais pas aller." Accepter de dépendre ainsi d'un
autre - mieux que cela : le vouloir, désirer cet abandon entre
les mains d'un autre, de ce qu'on a de plus intime et de plus
inviolable, sa liberté personnelle, son être profond -,
cela est une folie qui a pour nom : "amour". Une folie que rien
n'explique, sinon la gratuité mystérieuse d'une
initiative divine. Alors, avec Marie, en cette fête
de l'Annonciation, rendons grâce à Dieu pour toutes les
initiatives d'amour dont Il a marqué nos vies. Nicolas
PASCALON en religion
Père Michel-Marie. In La gazette de l'île Barbe n° 5 Eté
1991
*
Introduction
Homélie