Escapade en Val d'Aoste


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Lorsque, après les premiers lacets du Valtournanche, on découvre pour la première fois le sauvage versant sud du Cervin, c'est l'extase ; la cime mythique ne vous lâchera plus le long des vingt derniers kilomètres de la rude montée menant à Breuil-Cervinia. Et l'ardent désir de la conquête s'empare de votre esprit.

"Cime exemplaire, a dit G. Rebuffat, symbole ce puissance et de beauté."

Breuil est une station prétentieuse et peu accueillante, conçue essentiellement pour la satisfaction de quelques privilégiés amateurs de ski "toutes saisons". La déception est bien vite oubliée sur le chemin qui nous mène au refuge de l'Orionde, première étape de l'aventure...

Il faut ensuite trois bonnes heures pour atteindre le refuge Carrel, sur le fil de l'arête du Lion, à 3.800 m : la vision du Weisshorn et de la Dent Blanche arrive à point nommé pour gommer la fatigue et faire renaître l'enthousiasme.

La suite ? Ce furent les difficiles conditions d'ascension (un orage nocturne avait tapissé les parois de neige et de verglas), la succession des passages aux noms de légende : le Mauvais Pas, le Linceul, la Cravate, l'Enjambée, et enfin l'émotion extrême qui saisit, et balaie tout autre sentiment, à l'approche de la croix de fer, à 4.478 m. Joie intense d'avoir été, un matin, le "fou du Cervin", cent vingt-cinq ans après la conquête de l'arête du Hornli par Whymper.

A 30 km au sud d'Aoste, le village de Cogne s'avère très riant et accueillant, niché au fond d'une large vallée, au pied du Grand Paradis. L'ambiance y est bon enfant, les promenades de tous niveaux, innombrables. Des mines de fer ont été exploitées ici jusqu'en 1.900, mais maintenant, la nature a repris tous ses droits : il est rare de rencontrer ailleurs une cohabitation aussi harmonieuse entre promeneurs et faune alpine (marmottes et chamois notamment).

Nous reviendrons.

 

François CABANE

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in La gazette de l'île Barbe n° 3

Hiver 1990

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